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Horlogerie. En 20 ans d’existence, ce sous-traitant sédunois a conquis un beau marché: il sert la plupart des grands noms de l’industrie bien que sa clientèle se trouve hors canton.
Quelle est loin du Valais la Watch Valley! S’étirant entre Genève et Bâle, cet arc couvre la vallée de Joux, la Chaux-de-Fonds, le Locle - tous les hauts lieux de cette industrie. Pourtant, un acteur incontournable de l’horlogerie suisse s’est installé au bord du Rhône, à Sion. L’entreprise Mimotec fabrique des microcomposants pour une centaine de clients. Sa production d’approximativement quatre millions de pièces par an – pour un prix moyen de 3,75 francs par une unité – se retrouve dans les montres de presque toutes les marques helvétiques.
Doctorant en microtechnique de l’EPFL, Hubert Lorenz a fondé Mimotec dans la foulée de ses recherches, grâce aux inventions découlant de son travail de thèse en 1998. L’assise valaisanne n’était pas une évidence mais un choix logistique. «Nous réfléchissions alors à différents endroits où nous installer. Par hasard, notre premier client était sédunois. Celui-ci est devenu actionnaire et nous a soutenus durant les premières années de vie de la spin-off», raconte-t-il.
Une précision micrométrique
Sur la base de plans fournis par la clientèle, la PME produit des roues dentées, ressorts et autres pièces d’une taille généralement inférieure au centimètre carré. «Le composant le plus petit fait 0,7 mm de long sur 0,5 mm de haut – une poussière», commente-t-il.
La technologie utilisée par Mimotec se nomme UV-LIGA. C’est une combinaison de photolithographie et d’électroformage. «D’abord, nous créons un moule par photofabrication. Ensuite, nous y faisons croître du métal par une méthode additive, atome après atome». Les productions se déclinent dans un panel de matières: alliage à base de nickel, de fer et d’or. Il faut généralement six semaines pour réaliser une commande, mais Mimotec propose également une offre fast-prototyping de douze jours. Loin d’être une technologie figée, l’équipe R&D de la société veille à toujours innover. Chaque année, elle dépose un ou deux brevets pour de nouvelles inventions.
Au début des années 2000, Mimotec était précurseur sur le procédé UV-LIGA. Désormais, quelques groupes horlogers l’ont intégré en interne. «Nous ne sommes plus seuls sur le segment. C’est un peu stressant mais aussi rassurant car nous avons ouvert la voie à une méthode qui fait maintenant partie du paysage de la micromécanique horlogère. Les étudiants en horlogerie étudient ses potentialités, par exemple», dit-il.
Deux niches de diversification
Le chiffre d’affaires de l’entreprise s’établit à environ 15 millions de francs. Il est intimement lié à la santé du secteur horloger. Pour être moins tributaire de tels aléas, l’entreprise développe deux marchés de diversification: les pointes de test pour les puces micro-électroniques et les signatures d’anti-contrefaçon. Ces deux volets ne représentent encore que 5% des ventes: «Mais si on ne lance aucun hameçon, on n’obtient rien», affirme le CEO.
La pointe de tests pour composants micro-électroniques, appelée MEMS Probe, est un marché croissant. «Le consommateur change régulièrement de smartphone ou d’ordinateur – ce n’est pas le cas pour une montre suisse haut de gamme.» Or, l’industrie vérifie 100% des puces qui se retrouvent dans les appareils électroniques. Les MEMS Probe palpent ces petits éléments high-tech pour en vérifier le fonctionnement.
La solution d’anti-contrefaçon de Mimotec permet l’authentification d’un produit, grâce à une signature réfléchissante impossible à copier. Il développe: «Nous créons une pièce dotée d’une surface nanodifractive. Lorsqu’un faisceau laser est projeté dessus, elle renvoie un logo. Cela authentifie la pièce». Adapté au métal et au plastique, ce procédé d’inscription cachée est déjà utilisé par deux marques horlogères: une arme efficace pour lutter contre les dégâts d’image résultant des produits contrefaits.
Une envergure grandissante
Hubert Lorenz indique: «A nos débuts en 1998, nous étions trois collaborateurs; 20 ans plus tard nous sommes 47. Le Valais n’est pas une zone horlogère. Nous sommes loin de notre clientèle et, si nous n’étions pas bons dans ce que nous faisons, nous n’aurions aucune chance de survie». Bien qu’il soit difficile d’amener des talents venus d’ailleurs vers Sion, le CEO est satisfait de la fidélité de ses collaborateurs, conséquence de la localisation valaisanne et de l’absence de concurrent régional direct. «De plus, le canton regorge de profils compétents en méthode industrielle grâce à son industrie chimique et métallurgique, ainsi que d’ingénieurs performants grâce à la Haute école d’ingénierie HES-SO.»
Ingénieurs, techniciens, polymécaniciens, commerciaux, opérateurs en salle blanche évoluent sur les 2000 m2 des bureaux et usines de la route des Iles. «Nous commençons à y être à l’étroit. D’ici quelques années, nous nous déploierons sans doute dans un second bâtiment.» Depuis 2009, ce bâtiment est le troisième foyer de la spin-off qui prend de l’ampleur au fur et à mesure des années. Il abrite aussi la société sœur de Mimotec: Sigatec. Fondée en 2006 en collaboration avec la manufacture horlogère Ulysse Nardin, elle fabrique des pièces en silicium.
Depuis juin 2017, la PME a intégré le groupe jurassien Acrotec: un consortium d’une douzaine de producteurs de composants horlogers. Au total, cette structure rassemble 700 employés pour 200 millions de chiffre d’affaires. Un atout de taille selon Hubert Lorenz: «Cela nous offre l’avantage d’un vaste réseau à travers lequel nous proposons des solutions globales à nos clients donc de meilleures offres».
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Sophie Marenne
AGEFI
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